Emprunter aux voisins plutôt qu’à la banque

Stacy Mitchell a publié un article fort intéressant dans la revue Yes! Pour ouvrir une librairie, un café ou un restaurant de quartier, de plus en plus d’entrepreneurs font appel à leurs futurs clients.

Au cours de l’année 2008, deux entrepreneures décident d’ouvrir une librairie à New York. Les habitants de Fort Greene, un quartier de Brooklyn, étaient aux anges. C’était un besoin depuis longtemps exprimé lors des enquêtes effectuées par l’association de quartier. Les deux entrepreneurs avaient alors fait part de leurs intentions à la Fort Greene Association. Même si le local n’avait pas encore été trouvé et le financement pas attaché, une fête avait été organisée à l’honneur de ces deux entrepreneures très audacieuses. Plus de 300 convives s’y étaient alors présentés. C’était à la mi-septembre.  Une semaine plus tard, l’Amérique était plongée dans une des plus graves crises financières de son histoire, obligeant les banques à resserrer leurs critères. Impossible d’obtenir les capitaux de départ.

L’accueil chaleureux qu’elles avaient reçu, leur avait donné l’idée de solliciter l’aide des habitants. En quelques mois, 70 000 dollars  avaient ainsi été ramassés sous la forme d’une vingtaine de petits prêts octroyés par de futurs clients. Le montant minimum du prêt avait été fixé à 1 000 dollars et le prêteur pouvait déterminer lui-même le taux d’intérêt, selon une fourchette située entre 2% et 4%. Un peu plus d’an après le début des démarches, la librairie Greenlight voyait le jour sur la rue Fulton. Très vite, les ventes avaient dépassé toutes les prévisions des propriétaires.

L’arrangement est très avantageux pour les deux parties : des entrepreneurs qui ont besoin de financement et de clients fidèles, et des épargnants qui ont besoin de services  dans leur communauté et de faire fructifier leurs épargnes, surtout avec la faiblesse des taux d’intérêt actuels. Ce financement communautaire n’a pas pour objet de se substituer aux banques, mais à les compléter. Il peut favoriser entre autres, le retour des commerces dans les centres-villes et dans les quartiers d’affaires. Les banques refusent souvent de financer de telles entreprises à cause du facteur de risque ou du peu de garanties offertes par les demandeurs.

Et les exemples se multiplient! Les propriétaires du Awaken Café à Oakland en Californie, ont prévendu à 1000 dollars pièce, des bons d’achat permettant de consommer pour  une valeur de 1 250 $ dans le restaurant.  Les clients qui avaient acheté ces bons étaient attachés à leur réussite. Ils avaient donc personnellement intérêt de parler du café et d’inviter leurs amis.

Au Québec aussi les exemples se multiplient. Spontanément,  devant le refus des institutions à accorder leur aide, les clients ont répondu à l’appel lancé par leur microboulangerie de Montréal. Le Fromentier est donc parvenu à trouver les sommes nécessaires à son déménagement et à l’aménagement du nouveau local en vendant 400 bons de pain à 100 $ chacun. Chaque « co-pain » avait par la suite droit à 125 $ de pain en retour sur son «investissement ». Même la station de ski le Massif de Charlevoix (voir mon livre Entreprendre et réussir : 10 success stories de bâtisseurs d’entreprise francophones) a eu recours à cette stratégie pour trouver les fonds pour se lancer dans de nouveaux investissements.

À l’heure où l’État providence tend à diminuer ses aides financières, chacun d’entre nous peut  jouer un rôle en prenant en charge notre propre développement. Il est temps d’explorer d’autres alternatives de financement afin de stimuler le développement économique et l’entrepreneuriat. Et le financement communautaire est une solution très intéressante à explorer.

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